Xing Luwei doctorante Chinoise, son année au Centre franco-chinois de l’IAE Nantes
Pouvez-vous vous présenter, nous dire d’où vous venez, quel est votre parcours, pourquoi vous êtes au Centre Franco-Chinois cette année ?
Je suis Xing Luwei j’ai 33 ans et je suis arrivée en France le 22 octobre 2016. J’ai appris le français en Chine en licence de langue française puis j’ai fait un master 2 La Culture dans l’enseignement français à Lyon 2 il y a quelques années. Actuellement je suis inscrite en Chine pour un doctorat sur le management Interculturel. Je suis venue à Nantes cette année pour continuer ma thèse avec le soutien de Brigitte Charles-Pauvers ma directrice de thèse en France. Mon sujet de thèse porte sur l’incertitude au travail en Chine et en France.
Expliquez-nous votre sujet, concrètement de quoi est-il question ?
En Chine je travaillais comme interprète dans une entreprise Franco-Chinoise et je me suis rendue compte que Français et Chinois avaient des comportements et attitudes différents face à une situation incertaine. Par exemple, avant de prendre une décision ou d’organiser, prévoir quelque chose les Français anticipent et organisent beaucoup alors que les salariés chinois ont tendance à se laisser porter par l’incertitude et à s’adapter au fur et à mesure de l’évolution d’une situation. Pour la planification d’une simple réunion les Français s’y prendront très tôt alors qu’en Chine on peut prévoir un rendez-vous le matin pour le jour même !
Que vous a apporté cette année en France, en quoi vous a-t-elle aidé à avancer sur votre thèse ?
Cette année en France fut très enrichissante, j’ai pu consulter beaucoup d’ouvrages à la bibliothèque et nombreux sont les enseignants à m’avoir aidé dans ma recherche. Ma directrice de thèse a passé énormément de temps avec moi, elle m’a véritablement accompagnée et aidé à définir une direction, une orientation claire et à m’y tenir. M Roland Depierre professeur en civilisation chinoise et philosophe, m’a donné les clés pour toujours réussir à recentrer mon sujet sans me perdre. Il m’a conseillé des livres, donné des idées. Grâce à lui, j’ai écrit la première partie de ma thèse : le fondement de la culture française et chinoise sur l’incertitude. L’Université permanente organisée ici avec le cours « Affronter les incertitudes » a clairement enrichi mon propos. Par la suite, j’ai aussi suivi le cours sur les stratégies dans les entreprises de Jean-Pierre Brechet enseignant-chercheur à l’Université de Nantes. Je suis allée bien plus loin que j’espérais dans l’avancement de ma thèse. Elle a beaucoup évolué, j’ai trouvé la bonne direction je sais précisément ce que je vais écrire maintenant. Avant c’était assez flou.
D’où vous vient cet intérêt pour la France ?
Quand j’étais petite, à l’école primaire, nous avions une leçon durant laquelle une phrase de mon professeur m’a touchée « Le français est la plus belle langue du monde ». Ayant déjà un grand attrait pour les langues je crois que cette phrase fut l’élément déclencheur de ma fascination pour votre pays. En Chine, à l’époque, le français était une langue obligatoire soit dès le collège, soit au lycée et j’ai également appris et apprécié l’anglais. Je m’intéresse beaucoup à la culture française. La liberté de la pensée, les grands écrivains, les penseurs, les philosophes, autant de grandes figures et de mouvements qui permettent de voir le monde d’une autre façon et c’est ce que j’aime dans votre culture.
Comment avez-vous connu le Centre franco-chinois ?
Je ne le connaissais pas, c’est tout simplement une affiche sur la porte du bureau des enseignants en français à Canton qui m’a interpellée. Cette affiche était dédiée au centre franco-chinois de l’IAE Nantes. J’avais aussi échangé avec M Zheng, qui vient chaque année en France pour donner des cours sur l’interculturalité pour préparer les étudiants français à leur arrivée en Chine. Les atouts du centre franco-chinois étaient pour moi de pouvoir accéder à une documentation fournie sur place et d’avoir un véritable suivi de mon travail de la part des enseignants. Le centre propose une vraie coopération et une adaptabilité de la façon de travailler pour les doctorants comme moi.
Quel est votre regard sur les étudiants du Centre franco-chinois ?
C’est très intéressant de pouvoir avoir un regard croisé sur le lien entre les étudiants chinois et les étudiants français. On remarque rapidement que les plus grosses difficultés se cristallisent sur le plan de la coopération pour les travaux en groupe. Pour les étudiants chinois les problèmes majeurs reposent souvent sur des malentendus liés à la difficulté de maîtriser la langue. Mais globalement, je trouve que c’est relativement facile de s’intégrer à la société française. Il y a un très bon accueil à l’Université de Nantes, nous avons accès à beaucoup de choses très vite pour nous faciliter la vie.
Un conseil pour un étudiant français qui aimerait aller en Chine pour ses études, comment s’adapte-t-on ?
Il faut impérativement apprendre le chinois et avoir un esprit ouvert, nous savons très bien que nos cultures sont très différentes, ces évidences invisibles comme je les appelle doivent être assimilées, intégrées, pour ne pas rentrer dans une logique de jugement et s’arrêter au fait que telle ou telle pratique nous semble bizarre.
Pour les étudiants chinois qui souhaite venir en France ?
Je pense que c’est la même chose. Il faut rester avant tout ouvert, ne pas s’enfermer, participer aux soirées, se faire des amis et aussi évidemment pratiquer la langue française. Ce sont les meilleurs moyens de comprendre et découvrir un pays, une autre culture. Il y a beaucoup de flexibilité pour les étudiants français, en Chine les étudiants sont plus dans l’écoute que dans l’action, dans le faire. C’est aussi pour cette raison que les étudiants chinois sont un peu bousculés quand ils arrivent dans un cours en français. Par exemple, pendant les cours, les Français prennent beaucoup de notes très rapidement alors que moi, en Chine, et les étudiants chinois en général, nous sommes plutôt adeptes de l’enregistrement audio. C’est une vraie difficulté au début car si j’écoute le cours je ne note pas et si je commence à noter je perds le fils de ce qui est dit ! Au début suivre les cours était difficile, à cause de cela il faut être patient. Courage cela s’améliore avec le temps !
Et vous quel est votre meilleure souvenir de cette année en France ?
La gentillesse, l’accueil des enseignants, des gens, ils m’ont donné tout leur savoir sans rien attendre en retour. M Briché m’a conseillée des livres, il m’a aiguillée sur des pistes… Tout cela m’a beaucoup touchée. A l’Université permanente j’ai été accueillie dans une classe et l’enseignant m’a donné l’occasion de faire un exposé avec les autres pour mieux m’exprimer et m’intégrer, c’est un très bon souvenir.
En revanche, avez-vous connu des difficultés cette année ?
L’administration fut ma plus grande difficulté sans conteste ! Tout semble très compliqué ici au niveau administratif. Il faut un RIB pour avoir une résidence, sauf que pour ouvrir un compte il faut une adresse fixe, c’était insoluble !
Avez-vous relevé des différences inattendues entre la Chine et la France ?
En France c’est très calme je trouve, il n’y a pas beaucoup de bruit, contrairement en Chine où un brouhaha incessant de moteurs et de klaxons résonne en continu. Ici, les rues sont calmes, personne ne parle à très haute voix. Cela m’a véritablement frappé dès ma sortie de l’avion ! En revanche, la nourriture de mon pays m’a beaucoup manqué, il y a plein de spécialités évidemment que je ne retrouvais pas ici en France et les restaurants chinois ici ce n’est vraiment pas pareil !
Si vous aviez un objet représentatif de votre année en France lequel serait-ce ?
L’affiche du festival de l’incertitude donnée par M Roland Depierre. C’est mon sujet ! Et aussi mon badge de La Journée scientifique à l’Université de Nantes, pour moi ces deux objets sont représentatifs, car ces manifestations ont totalement nourri ma thèse !
Savez-vous déjà l’orientation que vous souhaitez prendre après votre thèse ?
En Chine j’ai travaillé 5 ans en tant que professeur à l’Université de Shandong à Weihai (près de la Corée du Sud), mon poste m’attend toujours là-bas. Je continuerai aussi mes recherches sur l’interculturel. Je suis inscrite à l’université d’étude étrangère à Canton avec un de mes professeurs nous avons un centre de recherche sur l’interculturel, je travaillerais avec lui à continuer de développer les sujets en cours.
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